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Greenwashing, sexisme… Un nouvel outil citoyen pour signaler les publicités problématiques

Encart de problème. Face aux publicités trompeuses, sexistes ou faussement écologiques, sept associations lancent un Observatoire citoyen de la publicité. Objectif : permettre de signaler les campagnes jugées abusives et interpeller les pouvoirs publics sur le manque de régulation du secteur.
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Il y a les publicités mensongères, celles qui se parent de vert pour mieux masquer leur empreinte écologique réelle. Celles qui recyclent, encore et toujours, les mêmes stéréotypes sexistes – réduisant le corps des femmes à un argument de vente. Et puis, il y a celles qui exaltent la nouveauté pour mieux nourrir la surconsommation, sans jamais parler des caractéristiques techniques du produit qu’elles vantent.

Dans cette publicité de 2018, la compagnie aérienne Easyjet vendait un voyage en avion… sans montrer d’avion.

Toutes ces publicités, les citoyen·nes peuvent désormais les signaler. Ce lundi, Les Amis de la Terre France, Communication et Démocratie, Halte à l’Obsolescence Programmée, l’Institut Veblen, Résistance à l’Agression Publicitaire, Sherpa et Zéro Waste France lancent leur Observatoire citoyen de la publicité. L’Objectif : consigner les publicités «abusives, trompeuses sur le plan écologique ou social, ou véhiculant des stéréotypes dégradants», détaillent les associations dans un communiqué.

Ce nouvel outil se présente sous la forme d’un site Internet où chaque internaute peut signaler une publicité jugée problématique. En quelques clics, le formulaire invite à renseigner la marque concernée, le lien vers la campagne ou une photo de l’affiche incriminée. Promotions, cartes-cadeaux, spot vidéo… «N’importe quelle image fixe ou animée qui contient un slogan et vend un produit peut être déposée» sur la plateforme, complète auprès de Vert Renaud Fossard, délégué général de Communication et démocratie, l’association qui pilote le dispositif.

Un aperçu du formulaire en question. © Observatoire Citoyen de la Publicité/Capture d’écran/Vert

Après leur dépôt, les signalements seront examinés par un «secrétariat permanent», tenu par une experte en sémiotique (qui sait analyser les signes et la fabrication du sens), explique Renaud Fossard. Cette dernière évaluera la recevabilité de chaque signalement, avant publication sur le site, à la lumière de la réglementation en vigueur, notamment. «Mais on prévoit aussi de définir de nouveaux critères plus exigeants», indique-t-il. Car la législation reste lacunaire : «L’objectif est aussi d’interpeller les pouvoirs publics pour faire évoluer les règles qui encadrent la publicité», insistent les associations.

34 milliards dépensés chaque année pour la publicité

Le lancement de l’Observatoire intervient quelques semaines après la publication le 10 septembre d’un rapport conjoint des inspections générales des finances (IGF), de la culture (IGAC) et du développement durable (IGEDD) sur la publicité et les comportements qu’elle induit. Les autorités y concluent que «les communications commerciales», qui représentent 34 milliards de dépenses annuelles en France chaque année, contribuent à «une consommation peu durable, avec des impacts environnementaux et sanitaires avérés».

Par ailleurs, le rapport avance plusieurs propositions de réforme, sur lesquelles «l’exécutif tarde encore à se prononcer», lancent les associations. «Depuis la loi Climat, les débats institutionnels sur la régulation de la publicité se multiplient mais les réformes ne suivent pas. C’est pourquoi nous appelons les citoyennes et citoyens à déposer des signalements en masse pour faire bouger les lignes», plaide Jeanne Wetzels, porte-parole de l’Observatoire.

Bangalore (Inde), décembre 2023. L’entreprise Uber communiquait sur son service «Uber green» et vantait des trajets écologiques à bord de véhicules électriques. © P. L. Tandon/Flickr

L’urgence d’agir s’est encore vérifiée récemment, rappelle Renaud Fossard : «L’exemple de TotalEnergies nous l’a montré.» Jeudi dernier, la justice a condamné TotalEnergies pour pratiques commerciales trompeuses à la suite d’une vaste campagne de communication lancée en mai 2021. Le groupe pétrolier y affirmait viser la «neutralité carbone d’ici 2050», tout en poursuivant l’expansion de sa production de pétrole et de gaz. Le tribunal de Paris a jugé cette communication mensongère, estimant qu’elle constituait une désinformation «susceptible d’altérer le comportement d’achat du consommateur» et de «l’induire en erreur».

Pour les associations spécialisées, la campagne de TotalEnergies constitue un exemple emblématique de greenwashing. Mais elle n’est qu’un cas parmi d’autres. Si le géant de l’énergie a été rattrapé par la justice – le tribunal lui a ordonné de retirer ses messages trompeurs et de publier la décision de justice sur la page d’accueil de son site pendant 180 jours –, bien d’autres publicités du même genre passent encore sous les radars.

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